New York, Chicago, Hong Kong… Soyons francs : ces villes verticales, tout en hauteur et pour lesquelles beaucoup d’entre nous, touristes le nez en l’air, ont les yeux de Chimène, tant leur verticalité nous aspire, n’ont pas attendu le ZAN* pour afficher leur ligne élancée vers le ciel.
Pour autant, ici sur notre territoire, alors que le *Zéro Artificialisation Nette s’impose sur les territoires, rebattant les cartes de la manière d’occuper les sols et donc d’habiter, la ville verticale donne nettement moins le vertige… Fascinante ailleurs, telle une forêt urbaine à la Gotham City ? Écrasante ici, de tout son poids insoutenable ?
La réinvention de la ville par le haut reste pourtant une opportunité, pour ne pas dire une nécessité. Avec pour enjeu de créer de nouveaux équipements, de répondre aux enjeux de mixité sociale, fonctionnelle et écologique… Et d’en finir avec l’étalement urbain.
Ville verticale : la tour, prends garde !
Avec près de 80 % des Français qui plébiscitent le pavillon (avec jardin pour la balançoire et le BBQ s’il vous plaît) comme modèle d’habitat, nous sommes bien avancés pour leur vendre l’idée de ville verticale et donc d’habiter en appartement ! Tours plantées sur dalles, barres d’immeubles tout sauf sexy : reconnaissons que ce modèle hérité des années 70 a laissé de vilaines traces dans les esprits et quelques cicatrices dans le paysage urbain. D’ailleurs on n’hésite plus aujourd’hui à les détruire, les pouvoirs publics étant bien conscients qu’entre normes dépassées, risques à tous les étages et nouvelles exigences environnementales, ces bâtiments ont vécu.
Quand 2,7 millions de ménages vivent en situation de surpeuplement
Détruire des barres d’immeubles pour les remplacer par de nouveaux logements, plus écologiques et plus sains : d’accord, mais où logera-t-on les gens ? En particulier dans les métropoles, attrayantes car dynamiques, dotées de services et pourvoyeuses d’emplois ?
Entre le taux de natalité en hausse, l’attractivité pour les villes de l’Ouest et le phénomène de décohabitation, les besoins en logement vont croître de plus belle : d’où la nécessité de repenser la ville avec plus de verticalité.
D’autant plus que l’étalement urbain à la Spielberg dans le film “ET”, avec ses lotissements bien propres et bien alignés, c’est fini. La raison en est simple : pour respecter l’environnement, les communes qui se développent doivent aujourd’hui éviter de s’étaler : c’est la démarche ZAN qui “demande aux territoires, communes, départements, régions de réduire de 50 % le rythme d’artificialisation et de la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers d’ici 2030”.
Autrement dit, profitons de sites industriels abandonnés, allons voir du côté des « dents creuses » et bâtissons, pour ne pas dire… Densifions.
Ville verticale, oui ! Mais aussi désirable…
Les citadins, parlons-en ! De qui parle-t-on au juste puisque les familles ont depuis longtemps déserté les centres-villes ? Le constat est établi : selon le magazine Néoruro, chaque année, depuis le début du siècle, 100 000 familles désertent les villes pour la campagne.
Alors comment faire pour rendre la ville verticale désirable ?
- les niveaux de densité et la hauteur doivent avant tout être mesurés en fonction du tissu urbain local et axé sur la recherche d’harmonie avec l’existant. À votre avis, pourquoi la tour Montparnasse n’a-t-elle jamais été aimée ? Parce qu’elle n’a rien à faire là où elle est plantée !
- les espaces publics ancrés au sol doivent être valorisés : recherche de services associés, mobilité aisée… fini la dalle hors sol déconnectée de tout !
- que la tour doit être esthétique avec des avantages indéniables : ouverture des vues, confort des espaces de vie ou de travail, mise à disposition de nouveaux services et usages à l’échelle de l’immeuble (les immeubles américains mettent depuis longtemps des lave-linge à disposition dans leurs sous-sols), voire du quartier.
En sortant le grand jeu, les métropoles pourront donc voir revenir familles avec deux enfants et animaux domestiques. En bref, sauf à se réinventer, la “grande hauteur” est condamnée… À se vautrer.